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    Le cagibi-2-

    Ce n'est pas le cagibi de l'histoire:

    Il est juste là pour  vous donner une idée de ce que peut être un cagibi

    dans les anciens immeubles de Paris. 

     

    Son cagibi sous les escaliers

     

    Dans les années Cinquante, soixante, les gardiens d'immeubles se définissaient par un autre nom moins pompeux qui fut longtemps employé: ces gardiens étaient couramment appelés «des concierges». Donc la jeune femme était concierge au 57 Rue du faubourg-Saint-Denis: dans le 10 ème arrondissement de Paris. Elle avait fui son mari très violent sous l'empire de l'alcool; mais rien ne lui garantissait qu'il ne les chercha pas encore dans tout Paris et qu'il n'avait pas été se plaindre auprès des gendarmes? Elle savait qu'il aimait sa fille et que jamais, s'il avait su son projet à temps, il les aurait laissé partir sans empêcher sa femme de fuir avec la petite. Ce ne se serait pas passée sans qu'il y ait un drame! Ayant réussit son coup en prenant d'énormes précautions pour ne pas se faire repérer et en faisant bien attention de ne pas être suivit, elle avait trouvé refuge dans un de ces hôtel miteux ou l'on ne demande pas ou presque pas de papier et ou l'on ne s'intéresse guère à la vie d'autrui: C'était une chance pour elle qui s'était bien gardé de révéler qu'elle était avec une enfant de 9 ans. Une fois les formalités remplies, elle avait prit soins de faire entrer la fillette par une entrée dérobée, non sans avoir prit le temps de se restaurer, elle et la petite, dans un troquet du coin. Le matin, elle avait repris son travail comme-ci de rien n'était, en ayant pris soin d'acheter des croissants et des pains au chocolat pour quand sa fille se réveillerait. Comme convenu, elle avait donné la clef de la chambre aux filles de joie qui s'occupaient d'Elisabeth entre deux passes. Elles avaient pour consigne de lui donner à manger, de lui procurer des revues pour enfants, et de faire attention qu'aucun homme ne vienne se renseigner sur elle et sur sa gamine. Les prostituées s'étaient prises de sympathie pour la mère et la petite qui n'était pas difficile à vivre: elles lui apportaient des bombons, s'assuraient que la petite Elisabeth avait mangé à sa faim et lui avaient même apporté un tourne disque avec des 45 tours pour la distraire en lui recommandant de ne pas le mettre trop fort pour ne pas donner la puce à l'oreille au propriétaire; mais prenaient garde que la porte de la chambre louée au mois soit bien fermée. Personne ne devait savoir, en dehors d'elles et de sa maman, qu'il y avait une petite fille dans cette chambre: Pour l'école, il n'en était pas question tant qu'elle n'aurait pas une adresse fixe. Elisabeth restait donc cloîtrée des journées entières et ne sortait que le soir pour aller se restaurer avec sa mère dans un petit restaurant du coin pas trop cher, mais quand même assez éloigné de l'hôtel ou elles résidaient momentanément.

    Pour en revenir à notre histoire, Geneviève, forte d'avoir enfin trouvé cette loge de conciergerie pour elle et sa fille, remercia ses sœurs de galère et plia vite bagage sans qu'il ne se soit rien passé de fâcheux: aucun suivit de la part de la police ni même de son mari.

    Après avoir démissionné du salon ou elle travaillait depuis un bon bout de temps, elle et la petite Elisabeth emménagèrent dans cette loge bien suffisante pour elle deux. La loge, au paravent tenue par un vieux monsieur qui était décédé, n'avait pas beaucoup de meubles et le peut qui pouvait encore servir était en bien mauvais état. Ce n'était pas possible de les garder! Et puis, il n'y avait pas de lit pour Elisabeth et le lit d'une place qui était plutôt un lit pliant qu'un vrai lit, semblait miteux dans tout les sens du terme. Il fallait qu'elle trouve une solution et tout de suite. Elle avait remarqué le marchant de meuble mitoyen avec le marchant de literie: tous les deux attenant par l'arrière boutique, à l'arrière cour de la loge de conciergerie.

    Pour en revenir à l'histoire qui nous occupe, il y avait: mitoyen à la boulangerie, un marchant de papier peint qui faisait aussi marchant de couleur sur le côté gauche de la cour et, sur l'autre côté, un marchant de meuble mitoyen au marchant de literie. Les commerçants avaient, avec complaisance, fait crédit à la jeune femme qui venait de s'installer avec sa petite fille. Tous les meubles et literie dont elles avaient besoin afin de vivre décemment, avaient été livrés montés placés à l'endroit désigné par la jeune femme. Elle les avait obtenu par ces gens charmants qui avaient tous mi la main à la patte, si l'on puis dire. Enfin dans des meubles décent, des literies neuves, et de la vaisselle convenable obtenue aussi à crédit, et qui avait été mise à la disposition de Geneviève par ce couple sympathique de quincailliers! Geneviève exultait et se voyait repartie sur des bonnes bases, loin de son ivrogne de mari, de d'une mère tyrannique, d'un père passif, et d'un beau père pire que son mari! Elle prit le temps de s'installer avec goût, et rangea sa vaisselle toute neuve dans son buffet tout neuf, lui aussi. La conciergerie comprenait une salle principale ou le tableau électrique qui commandait tout ce dont elle était responsable se trouvait. La conciergerie comprenait une alcôve ou elle avait choisi d'y mettre son lit de deux places pour être à son aise. Sur le côté de l'alcôve, il y avait une sorte de petite pièce assez grande pour servir de cuisine et ou elle y avait placé le buffet que le marchand de meuble lui avait livré. La table de la salle à manger avec ses quatre chaises se trouvait dans la pièce principale, pas loin de la porte de la conciergerie et en face du tableau électrique. Il avait fallu trouver une place pour le lit d'Elisabeth? Il n'y avait qu'une solution: un lit secrétaire qui s'ouvrait au moment de se coucher. C'était très bien car la place, une fois la grande table de la sale à manger et les chaises en place, ne pouvait plus que contenir ce meuble. Tout avait été organisé par les locataires complaisants qui, la sachant veuve avec une petite fille, étaient venus de leur plein grès, aider en même temps que les commerçants, Geneviève. Satisfaite de ce retour de situation, jubilait. la jeune femme se sentait bien et sa petit Elisabeth était ravit de son beau lit secrétaire. Geneviève se sentait à l'abri. De cette façon, elle pouvait garder sa fille, s'occuper d'elle à temps plein quand il n'y avait pas d'école. Les établissements scolaires étaient moins regardants en ces années d'après guerre et Geneviève avait pu inscrite sa fille sans problème, mentionnant son veuvage récent.

     

     N.GHIS.

    Texte revisité et complété le 19 août 2016

     

    Photo de La main et la plume.

     

    L'histoire est longue: Je l'ai relu plusieurs fois

    et si vous trouvez quelques fautes de frappe ou d'étourderie,

    ne m'en tenez pas rigueur: les coquilles sont bien involontaires de ma part,

    Aucun comité de lecture n'est venu pour me lire.

    Soyez indulgents pour les fautes oubliées ici et là. Merci à vous.

     

     

    Mon petit coin sous les escaliers


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    Le cagibi-3-

    Ce n'est pas le cagibi de l'histoire:

    Il est juste là pour  vous donner une idée de ce que peut être un cagibi

    dans les anciens immeubles de Paris. 

     

    Son cagibi sous les escaliers 

      

    La conciergerie ou elles avaient toutes deux élu domicile, se trouvait très éloigné et à l'opposé du quartier Mirabeau qui ne lui faisait plus peur car Ivry-sur-Seine était la banlieue Parisienne. Cette conciergerie comprenait «le Central Sporting Club» qui était une salle de boxe très renommée parce que les plus grands boxeurs de l'époque, dont Marcel Cerdan, s'y était entraîné et produit bien avant la naissance d'Elisabeth. La jeune femme devait y faire le ménage en plus de celui de l'immeuble, distribuer le courrier, sortir tous les jours les poubelles, s'occuper de la loge, remplacer les ampoules usées des coursives et paliers de l'immeuble qui était assez grands, surveiller les minuteries qui devaient passées en alternatif à partir de vingt deux heures. Pour les locataires retardataires, et bien tant pis pour eux! Le règlement était très stricte sur les horaires. Tout était pour le mieux et toutes deux s'habituaient doucement à ce rythme de vie. Les locataires étaient correctes et avaient prit la jeune gardienne en sympathie. Quant à Elisabeth qui était une petite fille futée et et pleine de malice, elle avait su se faire apprécier par les adultes qui gravitaient autour d'elle. Elisabeth s'entendait mieux avec les adultes qu'avec les enfants de son âge. Elle s'intéressait à tout et connaissais très bien le reporter photographe qui couvrait les événement sportifs de cette salle mythique. Il s'appelait Monsieur Grégoire. Lorsqu'il y avait des matchs, la salle était toujours pleine et bien que n'en ayant pas le droit, la petite fille se glissait souvent parmi les spectateurs pour voir ce qu'il s'y passait. Elle s'introduisait aussi illégalement dans la salle de sport quand il y avait entraînement.

    Cette partie de son enfance était, pour elle, idyllique, et elle se prenait à rêver qu'elle pourrait bientôt accéder à un genre de petit placard qu'elle avait repéré et dont elle voulait faire son petit bureau. En effet, dans le couloir qui menait aux escaliers de l'immeuble, se trouvait un cagibi inoccupé et, plus loin, le Central. Ce cagibi qui ne servait à personne, elle le voulais pour en faire son bureau car l'idée d'écrire lui taraudait s'imposait de plus en plus à son esprit.

    Avec son idée en tête, Elisabeth entreprit de demander à sa mère la clef de ce cagibi qu'elle avait repéré. Celle-ci la questionna:

    - « Pourquoi est-ce que tu veux cette clef? Et la petite fille de répondre:

    - « Pour avoir mon petit coin à moi ou je pourrais faire mes devoirs tranquillement. Elle attendit fébrile, la réponse de sa mère, l'observant en train de réfléchir sur la nécessité de lui faire don de ce cagibi. Enfin sa mère ouvrit la bouche:

    - « Il me ferait un bon débarras! Lui dit-elle en regardant d'un air amusée la drôle de frimousse d'Elisabeth s'assombrir de dépit. - « Et puis, tes devoir et tes leçons: tu les fais déjà sur la table de la salle à manger!

    Sans se démonter, la petite fille rétorqua:

    - « Maman! S'il te plaît! Tu ne t'en sers pas, toi! Tu veux bien? Dis! Aller! Dis oui?...

    - « Il faut que je réfléchisse. Je te rendrais la réponse cet après-midi.

    Après l'avoir fait piétiner d'impatience toute la matinée, ce qui paru interminables à la gamine, sa mère se décida enfin à lui donner la précieuse clef, et elles allèrent toutes les deux inspecter le fameux cagibi pour voir s'il fallait le débarrasser de vieilles choses et le mettre en état. Elles ouvrirent la porte qui résista bien un peu n'ayant pas été ouverte depuis longtemps. Les toiles d'araignées, et la poussière, régnaient en maître dans ce recoin abandonné; mais, tout à sa joie d'enfant, Elisabeth sautais de joie, et riais de plaisir, faisant toutes les promesses du monde à sa mère pour qu'elle ne revienne pas sur sa décision. Devant tant d’enthousiasme et après maintes recommandations, La mère et la fille se mirent toutes deux à l'ouvrage pour nettoyer de fond en comble le fameux cagibi, et le rendre présentable.

    Elle avait des ailes la petite fille! Geneviève lui donna une ampoule neuve pour remplacer la vieille qui ne fonctionnait plus. Elisabeth avait des idées bien arrêtées; mais elle fut prise au dépourvu quand sa mère lança:

    - « Tu as maintenant la clef. Débrouilles-toi puisque le cagibi est à toi maintenant! Prends en bien soin car ce n'est pas moi qui ferais le ménage s'il est en désordre et sale! Elisabeth assura à sa mère que c'est elle qui s'occuperait de son bureau et qu'elle n'aurait aucun reproche à lui faire concernant la propreté de son petit coin de paradis. Ceci dit, toute fière, Elisabeth se hissa sur la chaise que sa mère avait amené de la loge. Geneviève prit soins de tenir la dite chaise par précaution afin que Elisabeth ne puisse pas tomber et se faire mal. La petite fille s'appliqua à changer la vieille ampoule contre la neuve toute seule, comme une grande, en faisant attention de ne pas perdre l'équilibre. Le cœur débordant d'enthousiasme, elle descendit de la chaise où elle était perchée. Elle ne cacha pas son émerveillement de voir son cagibi tout à l'heure si sombre, à présent bien éclairé. Geneviève alla chercher un tourne vis pour revisser l'interrupteur afin qu'il ne soit pas dangereux. Elisabeth avait ce regard émerveillé, qu'ont les petites filles qui viennent d'e recevoir un beau jouet en cadeau. Contemplant les contours de cette petite pièce aux murs de plâtre gris blanc, lézardés par le temps, qui s'offraient à sa vue, Elisabeth n'en revenait pas qu'une simple ampoule puisse accomplir ce petit miracle.

    Ce cagibi bien caché sous l'escalier de l'immeuble devenait son petit royaume. Sa porte en interdisait l'entrée à quiconque n'en possédait pas la clef. Ce petit débarras, était devenu son petit coin bien à elle.

    Parmi les commerçant du quartier, il y avait aussi une boulangerie pâtisserie qui donnait, par l'entrée du fournil, juste dans l'arrière cour de la conciergerie, et ou la petite Elisabeth était souvent fourrée. Les odeurs de pain frais et croustillant à souhait lui chatouillaient les narines et l'amenaient irrémédiablement à descendre les quelques marches du fournil pour se retrouver en pleine fabrication du pain ou de gâteaux. Au fur et à mesure que le temps s'écoulait dans la paix, La fabrication des gâteaux, des croissants, des brioches , du pain de mie et du pain de campagne ne lui était pas inconnus du tout! De plus, à neuf ans, on est curieuse et gourmande! Inutile de vous dire ce qu'elle ingurgitait comme gâteaux et croissants dès qu'elle en avait l'occasion! Tous les jours, Geneviève et sa petite fille avait du pain frais gratuit car le boulanger et sa femme avait pris la petite Elisabeth en affection comme ci j'étais leur propre enfant: ils n'en avaient pas, ce qui arrangeait bien la jeune gardienne de l'immeuble. La petite Elisabeth et sa mère était très gâtées avec ces sympathiques boulangers.

    Il arrivait encore à Geneviève de se remémorer cette fuite mémorable avec sa fille. Elle avaient tout laissé ne voulant pas se faire prendre en déménageant quoi que ce soit, consciente des commérages de son ancien quartier qui allaient bon trains sur leur compte v que son mari rentrait toujours pratiquement saoul et que les bagarres du couple ne passaient pas inaperçues. Geneviève ne supportant plus les commérages des commères du quartier, il fallait qu'elle ait le courage de partir pour elle-même et pour Elisabeth qui avait peur de son père.

    Dans sa nouvelle vie, Geneviève était à l'aise financièrement. Elle payait les traites de ses achats correctement aux trois magasins qui lui avaient rendu service. Comme elle recevait souvent de bons pourboires, il lui arrivait de s’acquitter d'une de ses traites en plein milieu d'une mensualité. De cette façon, elle avait plus que deux magasins à honorer en fin de mois et retombait toujours sur ses pieds. En fin d'année, les étrennes étaient conséquentes, ce qui lui faisait un bon petit pécule qu'elle mettait de côté pour les jours à venir ne sachant pas ce pouvait lui tomber dessus. Les locataires lui laissaient souvent de bons pourboires pour multiples services rendus comme arroser les plantes lors de vacances ou d'absences prolongées. Le travail était dur; mais Geneviève s'en sortait bien. Comme elle gagnait pas mal sa vie tout en ayant un œil sur sa fille, les choses allaient pour le mieux, car les avantages n'étaient pas à négliger: la jeune femme ne payait pas de loyer: ce qui se faisait en ces temps-là. Elle ne payait pas l'eau et l'électricité ainsi que le charbon pour se chauffer. C'était les avantages en nature dont un gardien d'immeuble pouvait profiter en plus de son salaire. La jeune gardienne faisait bien son travail et n'avait à sa charge que de s'occuper de sa fille et d'elle-même. En somme, tout roulait comme elle voulait: tous les résidents du 57 rue du faubourg Saint-Denis étaient en bon terme avec elle, ce qu'elle appréciait particulièrement, et la vie de la petite Elisabeth avait trouvé une sérénité pratiquement normale après des années de tourmente au côté de ses deux parents.

    Ce décor quelque peu différent de ce qu'Elisabeth avait eu l'habitude de connaître, lui profitait bien. Elle avait trouvé un semblant de paix et d'équilibre entre sa mère, l'école qu'elle aimait, et tout ceux qui gravitaient autour d'elle. L'enfant se plaisait bien dans cette atmosphère paisible du 57 rue du Faubourg Saint-Denis.

    La petite Elisabeth n'avait pas perdu de vu son objectif de devenir écrivain. C'était une petite fille avec des idées bien arrêtées. Déjà, à son âge, elle savait ce qu'elle voulait et n'en démordait pas tant qu'elle n'avait pas obtenu ce qu'elle désirait au plus haut point: avoir son petit coin à elle en dehors de la loge de conciergerie dont sa maman avait la charge était, pour elle, indispensable à son développement psychologique et intellectuelle.

    Elisabeth était également une petite fouine qui savait regarder autour d'elle et tirer partie de tout ce qu'elle pouvait récupérer à droite et à gauche: les magasins donnant directement de leur arrière boutique sur la cour intérieur ou se trouvait la loge de concierge, comprenant principalement l'immeuble dont sa mère avait la charge et, entre autre, le passage qui menait à la salle de boxe, la descente au fournil ou la petite se retrouvait souvent en train de regarder le boulanger faire son pain et les gâteaux dont elle se régalait lorsque celui-ci lui en donnait. Elisabeth avait même apprit sous la surveillance de ce bon gros boulanger, à faire les croissants au beurre qu'elle préférait aux croissants normaux. Elle avait aussi apprit à faire un glaçage pour les tartes aux pommes et autres tartes aux abricots, comme elle avait vu faire le boulanger confectionner des baguettes, des bâtards, des miches de pains de campagne, des flûtes, des ficelles parisiennes, et travailler son pétrin. Elle apprenait vite la petite Elisabeth et cela lui plaisait beaucoup!

    La fillette observait tout: aussi bien au dehors pour les petits objets que le marchand de meuble pouvait vouloir jeter, qu'au dedans, quand le boulanger l'appelait pour lui montrer quelque chose de nouveau ou pour lui donner comme chaque dimanche, les gâteaux si généreusement offerts. Le quincaillier n'oubliait pas non plus d'appeler l'enfant pour lui donner des verres dépareillés, des assiettes avec une petite ébréchure pouvant encore faire l'affaire, qu'elle allait remettre à sa mère. Mais ce qui l'intéressait au plus haut point: c'était les gros catalogues de papiers peints du marchand de couleur. Par exemple, elle savait à quel moment elle pouvait aller feuilleter ces gros catalogues mit de côté pour la poubelles dès que les nouvelles collections arrivaient. Les couleurs et les motifs de ces beaux papiers peints qu'elle n'osait pas prendre bien qu'ils soient là pour être jetés, et bien ces gros catalogues d'échantillons la hantaient. Elisabeth les voulait pour améliorer le décor de son cagibi qui avait de vilains murs lézardés et sales. Il fallait qu'elle puisse les prendre avant qu'ils ne disparaissent! Elle connaissait les heures ou sa mère devait sortir ces fameuses poubelles. Tous les matins de bonne heure, sa maman accomplissait ce travail fastidieux; mais elle en avait prit l'habitude et tous les jours de la semaine à partir de 5 heure 30 du matin, sauf le dimanche, Elisabeth voyait sa mère se lever pour aller sortir les fameuses poubelles. Elisabeth ne voulait pas que les catalogues prennent le même chemin que les autres qu'elle avait vu disparaître périodiquement. Elle n'avait pas osé demander tous les précédents; mais elle se promettait de ne plus en laisser échapper un seul! Cette fois-ci, elle les voulait! Un jour pas comme les autres, elle s'enhardit et demanda au marchand de papiers peints si elle pouvait les emmener dans son cagibi puisqu'ils étaient destinés au ramassage des ordures

    - « Pourquoi faire? Lui demanda celui-ci.

    D'un air très assuré, elle lui répondis:

    - « Pour décorer mon cagibi! Maman m'a donné l'autorisation de m'en servir comme bureau. Vous comprenez? Je veux y faire mes devoirs, lire, peindre, dessiner et, plus tard, devenir une poète-écrivain et il me faut un coin tranquille pour écrire!

    - « Ah, Bon? Tu veux devenir écrivain ?A ton âge?

    - « Mais y'a pas d'âge pour savoir ce qu'on veux faire! Lui rétorquât-elle très fièrement. - « Et Minou Drouet! Elle a neuf ans et elle a déjà publié des poèmes! Pourquoi pas moi? J'ai le même âge qu'elle!

    - « Oui: tu as raison! Approuva le marchant de papier peint. Pourquoi pas toi? Et bien, à partir de maintenant, je t'autorise à prendre tous les catalogues dont je me débarrasserais pour tapisser ton petit coin. Fît-il avec un petit air amusé.

    - « Oh! Merci! Merci beaucoup monsieur!

     

    Mon petit coin sous les escaliers


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    Le cagibi-4-

    Ce n'est pas le cagibi de l'histoire:

    Il est juste là pour  vous donner une idée de ce que peut être un cagibi

    dans les anciens immeubles de Paris.

    De plus les prénoms ont été changés pour les besoins de l'histoire.

     

     

    Son cagibi sous les escaliers

     

    Elisabeth s'empressa de rafler tous les catalogues qui se trouvaient être du côté de l'arrière boutique donnant sur la cour de la loge avant qu'ils ne soient destinés au ramassage des ordures. Ils étaient lourds et il y en avait cinq grands et gros: deux fois comme elle! Sans se démonter, la petite fille alla chercher sa maman pour l'aider à les charger sur le chariot qui, justement, servait à sortir les poubelles. Le chariot arriva jusqu'à son cagibi, non sans rouspétance de la part de Geneviève, car Elisabeth la dérangeait souvent dans son travail; mais elle n'en avait rien à faire et tout à sa satisfaction d'avoir osé demander ces gros catalogues au marchant de couleur, La petite choisis minutieusement les papiers peints en essayant d'en marier les couleurs le mieux possible. Encore prise à contribution par sa fille, Geneviève l'aida à faire de la colle avec de l'eau et de la farine pour encoller ses beaux papiers peints. Il y en avait des cloqués, des feutrés, des veloutés, des glacés, des mats, et les couleurs allaient du vieux rose au bleu nattier en passant par le mauve, le beige, vert clair avec des feuilles, des fonds rose pâle, jaune citron et toutes les couleurs de l'arc-en-ciel et chaque feuille faisait une cinquantaine de cm de côté. Avec un gros pinceau et un tablier pour limiter les dégâts sur ses vêtements, Elisabeth Radieuse, se mis à encoller d'abord un mur qu'elle commença à recouvrir de papiers peints bien choisit. A chaque pose de papiers, elle reculait pour voir l'effet produit. Ce patchwork était du plus bel effet! Elle mît plusieurs jours à faire un côté de mur et ne sortait de son cagibi que lorsqu'elle était satisfaite de son travail. Malgré ses rouspétances, Geneviève était souvent mît à contribution par Elisabeth qui n'arrivait pas à faire tout toute seule.

    Quand elle eu fini ce coté de mur, satisfaite de son travail, elle commença d'encoller l'autre côté. Le plus dur était à venir puisque le plafond de son cagibi suivait la courbe des escaliers qui menaient aux palier puis, aux appartements des locataires. Cela commençait à prendre tournure et elle admirais son superbe travail. Oh! Il y avait bien quelques défauts comme des cloques et des vagues qui ne voulaient pas s'aplatir; mais dans l'ensemble, son travail lui plaisait. Il lui vînt soudain une idée. Et si elle demandait au marchant de meuble d'à côté s'il n'avait pas, par hasard, parmi ses reliques invendues, une vieille table pas trop grande pour faire son bureau et une chaise pour rendre à sa maman celle de la salle à manger de la loge? De ce pas, et sans laisser le temps à son idée de refroidir, elle alla voir Mr Bertier et lui demanda tout de go:

    - « S'il vous plaît, monsieur! Est-ce que vous avez des vieux meubles abîmés que vous gardez dans votre réserve et qui ne vous servent à rien?

    Le propriétaire du magasin de meubles lui répondit non sans être intrigué:

    - « Oui, mon petit! Pourquoi?

    - « Parce que j'aurais besoin d'une petite table et d'une chaise pour mon cagibi? Maman ne peut pas me l'acheter et elle m'a dit de me débrouiller pour trouver toutes les choses qui me manquent et dont j'ai besoin!

    - « Ton cagibi? Fit le marchand de meuble tout étonné.

    - « Oui! Mon cagibi! Vous voulez le visiter? Fit-elle d'un air très assuré.

    - « Aller! Je veux bien et après, je regarderais mes vieilleries pour te trouver ce que tu me demandes.

    - « Vous savez, fît la gamine: cette petite table, c'est pour en faire mon bureau. Si vous aviez dans la réserve un petit bureau qui reste invendu, et si vous pouviez me le donner, je serais très contente!

    - « On regardera ça après. Répondit le brave homme.

    Ce petit cagibi (quand je dis petit, c'est une façon de parler car le débarras en question n'était pas si exigu que ça!) Ce petit cagibi, disais-je, lui permettait d'y entreposer une table par trop grande et une chaise, une malle en osier, des étagères et quelque bricoles encore. C'était son coin et elle en avait fais un lieu sacré... Petit à petit, elle y entreposa, dans une jolie malle en osier: cadeau du marchant de meuble, toutes ses poupées, ses jouets auxquels elles tenait le plus. Sur son petit bureau trônait ses livres de contes, ses cahiers et portes plumes, et dans ses cahiers personnels, elle y écrivait ses idées, ses rêves d'enfant et ses secrets. Elle passait des heures entières à dessiner, à peindre, à écrire tout ce qui lui venait à l'esprit, Elle y faisait ses devoirs, apprenait ses leçons quand elle ne rêvassait pas sur son projet de devenir écrivain. Elle se plaisait à demeurer dans son sanctuaire: Elle s'y sentait tellement chez elle et puis, elle en était la propriétaire grâce à cette clef magique qui lui ouvrait les portes de son univers...

    Un jour, elle entendis toquer à la porte de son cagibi.

    - « Qui est-ce! Fit-elle étonnée.

    - « Monsieur Bertier.

    - « Attendez monsieur: je vais vous ouvrir. Répondit-elle en se levant pour aller lui ouvrir la porte qui se trouvait toujours fermée à clef lorsqu'elle se trouvait à l'intérieur de son sanctuaire. Jamais personne ne venait lui rendre visite à part sa maman? Son cœur battait à tout rompre en ouvrant la porte et qu'elle vît le marchand de meuble qui tenait une lampe de chevet dans une de ses mains.

    - « Tiens. C'est pour toi. Lui dit-il.

    Toute surprise, elle se mis à pleurer.

    - « Mais qu'as-tu, petite?

    - « Je ne peux pas la brancher: il n'y a pas de prise!

    - « Ce n'est que ça? Ne pleure plus. Ce n'est pas grave! Je vais te la faire marcher moi, ta lampe!

    Toute rassurée, Elisabeth lui sauta au cou et lui administra un gros baiser sonore sur sa joue rugueuse.

    - « Et bien! Et bien! Tu m'étouffes petite fille! Ce soir, je n'ai pas le temps; mais demain, lorsque tu reviendras de l'école, tu auras ta lampe.

    - « Oh! Que je suis contente! C'est vrai que la grosse lampe que maman m'a donné pour remplacer la vieille ne fait pas très beau! Il manque un abat jour! Je vais dire à maman que vous m'avez gâté. Merci monsieur.

    - « Oh! Mais dis-moi! Tu as l’œil très sûr! Fît le marchand de meuble. Je vais tâcher de te trouver ça aussi. L'homme retint son émotion en la voyant si joyeuse et il parti d'un grand éclat de rire.

    Et bien! Si ce n'y a que ça pour te rendre heureuse, chaque fois que je te trouverai quelque chose qui pourrait t'être utile, je te l'amènerais. Ça te vas comme ça?

    - « Oh! Oui! S’exclama Elisabeth en sautant de joie et en tapant des mains.

    Le marchand de meubles s'en retourna comme il était venu. Elisabeth referma sa porte à clef en prenant bien soin d'éteindre la lumière, et couru raconter à sa mère ce qu'il venait de lui arriver.

    C'est un des souvenir le plus marquant dans sa jeune vie, car des moments tels que celui-ci ne furent pas si nombreux dans son jeune âge. C'est grâce à ce placard qu'elle s'est apprise à aimer lire et écrire pour le plaisir des mots... Pour le plaisir d'entendre, dans ma tête, la musique céleste qui les accompagnaient.

    Fin de l'histoire

    ** Cet une histoire vécu: un passage de la vie d'Elisabeth qu'elle n'oubliera jamais puisque, aujourd'hui, je vous la raconte."

    N. GHIS.

    Photo de La main et la plume.

    Texte revisité et complété le 19 août 2016

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    L'histoire est longue:

    Je l'ai relu plusieurs fois pour déceler les quelques fautes que j'aurai pus oublier. Si vous trouvez quelques fautes de frappe ou d'étourderie (coquilles), ne m'en tenez pas rigueur : les étourderies sont bien involontaires de ma part et le comité de lecture n'est pas venu me relire. (sourire)

    Soyez indulgents pour les fautes oubliées ici et là. Merci à vous.

    N. Ghis

     

    Mon petit coin sous les escaliers

     

    Témoignage d'un lecteur qui a connu l'endroit que je décris.

     

    Ci-après quelques précisions complémentaires.

     

    "Je me souviens du tournage du film "L'air de Paris" en 1954, je faisais les courses avec ma mère.... La scène ou on voyait la boulangerie Coing (Coing Ballit dans l'annuaire) avait été tournée plusieurs fois, car les réalisateurs ne voulaient pas que l'on voit les boulangers qui apparaissaient derrière un genre de store en toile orangée. 56 minutes après le début du film on voit l'entrée du Central sporting club. A gauche , au 55, un magasin au rideau de fer baissé, au dessus duquel on lit : "...terie", Probablement papeterie, (papeterie mon panache dans l'annuaire). Papeterie sous entend fournitures scolaires et de bureau, mais peut-être des papiers peints ? A l'intérieur du 57 une cour, une enseigne: "Central Sporting Club" et une publicité peinte sur le local intérieur à gauche du central: "MEUBLES installation complète d'appartements " ÉBÉNISTERIE DÉCORATION ". Dans l'annuaire 1954 et 1964 au 69 rue du faubourg Saint Denis (à gauche de la boulangerie MATHIEU au 71) on lit : Zaringer maison meuble couleur. Probablement le Bazar à l'enseigne PARIS COLOR qui existait encore dans les années 1970 "...

    Mon petit coin sous les escaliers

    Si vous saviez ce que ce témoignage m'a ému lorsque j'ai lu, grâce à ce monsieur que je ne connais pas du tout ! J'ai toujours les larmes aux yeux lorsque je relie ce témoignage qui me prouve que j'ai bien existé, que cette histoire ne sort pas de mon imaginaire ! Que j'ai réellement vécu ce que je décris dans cette nouvelle ! J'ai eu tellement de mal à me construire par la suite ! Tellement de mal à me persuader que je n'étais pas un fantôme qui n'avait pas de vie propre... Ce sont mes souvenirs d'enfance qui me servent de repaire et de photographie neuronale (mémoire ancienne). Ghislaine.

    Mon petit coin sous les escaliers


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