• Anne-Lise

     

    Anne-Lise

      

    Proverbe du jour

    "Comme on fait son lit, on se couche"

    La vielle fille - fiction



    Anne-Lise 

     

    Des cheveux ondulés, enneigés et soyeux, encadrant un visage où perle la tristesse, une vie monotone n'ayant pour seule richesse que les services rendus et les prières à Dieu. Tous les matins, à l'aube, elle s'en va à l'église pour changer l'eau des vases et remettre des fleurs. C'est un joli prénom que celui d'Anne-Lise! Peut-être un peu vieillot; mais si plein de douceur. Par habitude, elle reste à la messe de sept heure, fait toutes ses prières, examine son cœur, puis elle remet en ordre ses idées.

    Le dimanche, c'est elle qui joue de l'harmonium et monsieur le curé la tient en grande estime! Pour être aimée de tous, elle fait le maximum même si c'est pour rien que bien souvent elle s'escrime. A la sortie du culte, lorsque sonne midi, quand les groupes se forment afin de converser, elle s'éclipse sans bruit pour ne pas déranger, comme pour s'excuser d'être une vieille fille. C'est une fois chez elle qu'elle découvre le vide qui emplit sa demeure aussi vide que son cœur. Là, elle fait sans tricher, le bilan de ses rides et elle comptabilise une à une ses erreurs.

    Il ne lui reste rien de sa belle jeunesse lorsqu’elle éconduisait les garçons de son âge qui se glissaient souvent derrière à la messe pour toucher ses cheveux et frôler son corsage. Ils se pâmaient d'amour tandis qu'elle s'en fichait. Elle pensait à l'époque avoir assez de temps pour distinguer du nombre de ses soupirants celui qui saurait être l'élu qu'elle aimerait ; mais elle n'a pas su et le temps est passé. A présent, c'est trop tard. Elle trompe son ennui en se faisant du thé au citron parfumé qu'elle consomme lentement grignotant des biscuits.

    Le bonheur qu'elle avait à portée de son cœur lorsque de beaux jeunes hommes lui faisaient la cour, qu'ils la couvaient des yeux leur cœur emplie d'amour, lui récitant des vers d'une voix langoureuse. Pourquoi les refuser en faisant la coquette? Pourquoi les faire souffrir en les rendant jaloux? Pourquoi d'un air hautain, ébrouant ses froues-froues, de voir leur mine défaite, s'en allait-elle rieuse en leurs lançant de loin:

    -"Mon cœur n'est pas pour vous! Il sera pour celui qui saura le gagner!"

    Admirée, adulée de tous, elle aimait les hommages et elle s'en amusait la jeune écervelée! Mais à force de Jouer, de rire de ses soupirants, s'est flétrie sa beauté et tous ses prétendant, d'elle se sont détournés.

    L'on dit bien souvent que "l'herbe est bien plus verte ailleurs." Las de ses minauderies, ils sont parti vers des promesses meilleurs: Vers d'autres jeunes filles peut-être moins gracieuses; mais tellement plus avenantes... Ils s'en sont allés vers le printemps de la jeunesse et des jeunes filles en fleur qui brillaient par l'attrait de leur vingt ans.

    - Jeunes filles vaniteuses de votre beauté! Prenez garde qu'un jour, pour vous, la cloche sonne! Car le temps passe et lasse le plus fervent des hommes si vous laissez passer la chance d'être aimée...

    De vivre solitaire, Anne-lise n'a plus envie; mais ne sait pas comment rompre sa solitude. Elle sent fuir de son corps tout ce qui fait la vie, s'enfonçant, peu à peu, dans sa décrépitude. Le miroir qui reflète son mince corps de liane, lui dit que c'est finit. Que trop vite il se fane et qu'elle ne sera plus celle qui fait rêver! Et qu'il n'y aura plus de beaux jours pour aimer...

    Aucun prince charmant sur son beau destrier n'est venu l'arracher à sa morne existence. Et il lui faut subir l'outrage des années sans être accompagnée d'une tendre présence. Elle cherche à s'occuper par une broderie; mais ses mains tremblantes refusent tout effort: comme si, dans leurs veines, se distillait la mort pourtant, pourtant elles étaient longues ses mains: douces et graciles!…

    Cette maison où dorment des souvenirs heureux la rend mélancolique, embuant ses yeux bleus. Sa raison la tourmente l'empêchant de lutter et elle voudrait mourir, en finir, s'en aller...

    La pluie, cette ennuyeuse, s'est mise à tomber: c'est l'intruse qui tape aux vitres du salon et l'âme d’Anne-Lise se met à l'unisson de la nature qui pleure sans jamais s'arrêter. Anne-Lise n'a plus la force de faire face aux jours qui se succèdent aussi vides que sa vie. Elle n'a plus envie de continuer ainsi. Elle se sens tellement transparente et inutile, qu'elle a l'impression de disparaître là ou elle était jadis le centre d'attention des jeunes hommes de son âge. Les jeunes filles, à l'époque de sa jeunesse, lui en voulaient d'être si coquette, si courtisée, si jolie. Que tout ceci est bien loin!...

    Il serait tant de partir; de s'en aller en silence; mais sa vie semble tenace!
    Quand donc viendra le jour où, enfin délivrée, elle pourra, sans regret déposer son fardeau de craintes, de douleurs et de longs, longs sanglots: offrande douce amère d'une vie sans intérêt.

    Au loin, teinte une cloche: c'est l'angélus qui sonne. Elle regarde sa montre: vestige de sa jeunesse passée... Difficilement la vieille fille émerge de sa mélancolie. Il est indécent de ressasser des regrets bien inutiles! La seule façon, pour elle, d'assumer sa vie, c'est de s'abandonner à un dieu qui pardonne et qui seul peut combler son existence usée. Si elle est vieille fille, si elle n'est pas mariée, c'est qu'elle n'a pas su conduire sa destinée, que Dieu l'a voulu et ainsi décidé. Les voix de son seigneur sont bien impénétrables: invisibles pour elle comme pour ses semblables. Il faut bien rétablir un peu l’ordre des choses! Que peut-elle espérer? A quoi bon s'obstiner quand la stérilité de sa vie lui fait face! Anne-lise comprend qu'il lui faut accepter ce que la providence daigne lui accorder. Elle se dit que bientôt, pour un très long voyage, elle prendra son billet sans espoir de retour. Pas besoin de bagages! Juste un petit regret de mourir demoiselle. Juste ce petit regret d'avoir été coquette, d'avoir "loupé le coche" lorsque des prétendants toquaient tous à son cœur. Et qu'elle s'en amusait sans penser aux lendemains qui, se succédant bien trop vite, ont fait de son avenir, à venir, et sans qu'elle s'en aperçoive, bien trop vite, conjugué au passé... Il lui reste un regret, juste un petit regret : celui d'avoir, tout au long de sa vie, dédaigné les soupirants et restée bien trop sage en attendant l'élu qui n'est jamais venu. 

    Anne-Lise

    La vielle fille - fiction 

    N. GHIS. / La main et la plume 1947 

    Texte écrit en 1985

    Anne-Lise 

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  • Commentaires

    1
    Jeudi 21 Juillet 2016 à 10:36

    Révérence ma chère Ghislaine,

    J'ai adoré ta nouvelle, je me régale à chaque fois que je lis un de tes textes ! Tu as un grand talent, tu aurais pu être écrivaine ça c'est sûr ! En tout cas bravo pour cet agréable moment de lecture smile

    Depuis hier il fait plus frais et le ciel est nuageux, on est mieux !

    Nouveaux articles parus dans mes blogs aujourd'hui, mon amie adorée.Te voilà prévenue lol

    Je te souhaite une bonne journée, pas trop chaude j'espère.Pleins de gros bisous du coeur.

    Amitié de Florence

    2
    Vendredi 25 Novembre 2016 à 15:29

    Hello Ghislaine

    Une bien jolie nouvelle pour inciter les jeunes filles à ne pas être trop sages mais juste ce qu'il faut, hihihi

    Moi je n'étais qu'un garnement et ne suis pas resté sage bien longtemps, il y avait tellement de belles choses à découvrir, hihihi

    Quelle erreur de ne pas connaître l'amour sentimental et charnel.....

    J'ai toujours été contre le célibat des prêtres et des sœurs qui es une aberration....

    Amitiés

    Jo

      • Vendredi 25 Novembre 2016 à 17:31

        Bonsoir Jo,

        je suis du même avis que toi concernant les sœurs et les curés. Quand on voit tout ce qui se passe derrière les abbayes, les pensionnats tenus par  des sœurs, Merci: moi, J'ai déjà donné! Beaucoup de sœur sont vicieuses, perverses et cruelles. Ah! Elles peuvent aller se confesser après leurs méfaits! quant aux curés: je ne préfère même pas invoquer le sujets! Comme tous ces soit disant dogmes sont carrément dépassés, obsolètes, et hypocrites.  Je t'ai déjà dis que j'ai été dégoûtée dès mon plus jeune âges des religions en général. Tu as dû lire les raisons sur le premier blog qui est devenu: "Le mystère de l'étang aux ormes que je suis en train de la publication à cause de ce que j'ai découvert hier soir, et aussi parce que je ne pensais pas qu'il serait édité un jour; mais j'ai peut-être cette chance qu'enfin il le soit. Oh! ce ne sera pas mirobolant... mais ce sera mieux que rien. Si je suis satisfaite, et si tout se déroule comme je l'espère, je terminerais de mettre en forme le deuxième roman:

        " Autant en emporte la vie".

        Merci pour tes gentilles visites cher Jo! Amitié et bonne soirée! Ghis.

    3
    Vendredi 25 Novembre 2016 à 17:38

    Hello Ghislaine 

    Je te promet que je serais un lecteur fidèle, je commanderais ton livre dès qu'il sera publié et le suivant également..

    Je pense que je ne serais pas le seul, tu as des amis ici qui te suivront.

    Pour l'instant, je ne peux que t'encourager à poursuivre.

    Amitiés

    Jo

      • Vendredi 25 Novembre 2016 à 18:01

        Merci mon cher Jo, Ca m'encourage de savoir que je t'ai pour ami et que d'autres amis(es) me suivent également. J'ai souvent perdu confiance en moi durant toutes ces années de galère. Mais je suis tombée vraiment avec de vrais amis(es) et je suis heureuse de te compter parmi mes plus chers  amis  du net même si nous ne nous connaissons que pas PC interposés.  Tu sais: je ne suis pas une femme qui "pète plus haut que son derrière."LOL! Mais si l'édition est confirmée, je serai la plus heureuse des femme d'avoir réussi même si ça ne va pas plus loin que ces deux livres! Un grand merci, Jo, pour tes encouragements! Amitié et encore bonne soirée! Ghis.

      • Vendredi 25 Novembre 2016 à 18:05

        Si je me rappelle bien, lorsque le livre est édité, il y en a un certain nombre pour la famille et les amis. Si c'est toujours leur façon de faire, je t'en enverrais un de moi-même par poste ainsi qu'à mes fidèles autres amis(es) qui me suivent et qui m’encourage à persévérer... Ghis.

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    4
    Samedi 26 Novembre 2016 à 20:21

    bonsoir Gigi je ne t oublie pas ma douce amie, j 'etais pas la aujourd hui sortie entre copine, j essaie de sortir un peut plus de moins etre sur l'ordi , mais il faut que je me remette a écrire , j aime ton conte, c est triste pour cette femme qui n a pas su saisir l'amour quand il en était encore temps

    c est triste , elle finit sa vie seule

    je t embrasse ma douce amie

    Elyci

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